« Que signifie être l'Eglise dans un contexte marqué par la mondialisation et la violence ? » s'est interrogé le Secrétaire général du Conseil oecuménique des Eglises (COE), le pasteur Konrad Raiser, dans le rapport qu'il a lu devant le Comité central de l'organisation réuni en session à Genève (Suisse) du 26 août au 3 septembre.

Dans un monde où rien n'est prisé autant que la diversité et l'individualisme, mais où « d'autres sont obligés de vivre dans des communautés fragmentées sous l'impact de la mondialisation », l'engagement des Eglises, consigné dans la Constitution du COE, de « s'appeler mutuellement à tendre vers l'unité visible » revêt une importance nouvelle, estime-t-il.

Certes, « avec sa logique de pouvoir et de domination, le processus de mondialisation nous rappelle que l'unité peut devenir oppression ». Mais, argumente Konrad Raiser, théologien luthérien, « la vision de l'unité de l'Eglise n'est pas un projet hégémonique » et par suite il ne faut pas « renoncer à une unité authentique » au profit d'une « diversité illégitime ».

Et il précise : « C'est dans la mesure où les Eglises pourront se reconnaître mutuellement dans la diversité des cultures, des spiritualités et des identités confessionnelles qu'elles affirmeront leur cohérence dans la communion et qu'elles feront pièce aux forces d'exclusion et de fragmentation. » Cela présuppose, avertit-il, « qu'il existe un lien de communion fondamental » : celui du « baptême unique en Christ », point central de la discussion oecuménique dont les Eglises n'ont pas tiré toutes les conséquences.

Mais il y a plus : tirant argument de l'expérience des Eglises d'Asie, qui vivent la pluralité religieuse et « ne savent pas ce qu'est une Eglise établie », le Secrétaire général invite à entendre leur appel à un « oecuménisme plus large qui aille au-delà de la quête de l'unité de l'Eglise pour y ajouter la nécessité d'un dialogue interreligieux ». D'ailleurs, mardi 27 août, le Comité central consacre une séance plénière à la situation des Eglises en Asie.

Selon Konrad Raiser, la quête oecuménique d'unité est dans une étape décisive, provoquée il y a quatre ans par la remise en cause, par les Eglises orthodoxes, de leur participation au COE en raison du conflit entre deux conceptions différentes : « celle des Eglises qui, telle l'Eglise orthodoxe, « s'identifient à » l'Eglise une, sainte, catholique et apostolique, et celle des Eglises -plutôt de tradition réformée - qui se considèrent comme « faisant partie » de l'Eglise une, sainte, catholique et apostolique ». Le Secrétaire général relève qu'au long des travaux de la « Commission spéciale sur la participation orthodoxe au COE » instituée pour traiter de cette question, l'opposition de ces deux conceptions s'est heureusement muée en « défi mutuel » et fraternel de réinterroger chacun sa conception de l'Eglise.

C'est une chance supplémentaire pour l'oecuménisme, se réjouit-il, puisque « aucune Eglise ne peut relever seule ce défi : toutes ont besoin les unes des autres ». Et que dès lors le COE a un rôle critique et essentiel à jouer.