Communiqué commun de la FLM et du COE

Des responsables d'Eglise et des défenseurs des droits de la personne cherchent à intensifier sur le plan international la lutte contre la discrimination de caste, un fléau vieux de 3500 ans qui affecte des centaines de millions d'êtres humains dans le monde entier. La Conférence d'examen antiracisme des Nations Unies, qui doit avoir lieu à la fin d'avril, sera un premier test de cette stratégie.

La discrimination de caste touche gravement près de 260 millions de personnes dans le monde entier, dont environ 200 millions se trouvent en Inde. Dans ce pays qui passe pour être la plus grande démocratie du monde, ces personnes discriminées que l'on appelait autrefois "intouchables" et qui étaient traitées comme telles en raison des traditions rituelles brahmaniques qui les considéraient comme "polluées" ou "polluantes" se dénomment aujourd'hui dalits ("opprimés", "écrasés").

La discrimination de caste est si profondément implantée que les Eglises et les groupes de défenseurs des droits de la personne, en Inde et dans d'autres pays où elle existe, reconnaissent qu'ils ne peuvent pas résoudre ce problème par leurs propres forces. "Nous avons besoin de votre solidarité" ont-ils déclaré aux participants d'une conférence de quatre jours qui s'est tenue à Bangkok, en Thaïlande, du 21 au 24 mars sur la justice pour les dalits.

Organisée conjointement par le Conseil oecuménique des Eglises (COE) et la Fédération luthérienne mondiale (FLM) sous les auspices de la Conférence chrétienne d'Asie, cette conférence a accueilli 95 dirigeants et représentants d'Eglises et d'organisations des droits de la personne et de développement venus du monde entier. Ils ont pris connaissance de l'histoire et de la culture des dalits, des viols et des mauvais traitements subis par les femmes dalits, du travail forcé, des atrocités commises contre ces personnes et des massacres perpétrés récemment par des militants hindous à l'encontre de chrétiens dalits.

Les participants à la conférence de Bangkok reconnaissent que des progrès ont été faits dans la lutte contre la discrimination au niveau d'organismes de l'ONU tels que le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes et l'Organisation internationale du travail.

Se souvenant que la Conférence mondiale des Nations Unies contre le racisme, qui s'est tenue en 2001 à Durban, en Afrique du Sud, n'est pas parvenue à aborder la question de la discrimination de caste, ils estiment que la prochaine Conférence d'examen de Durban, qui aura lieu du 20 au 24 avril, offre une nouvelle occasion de relancer la question au niveau international.

Dans une déclaration intitulée "Déclaration et appel de Bangkok", les participants à la conférence appellent la communauté internationale à "offrir une tribune aux représentants des communautés dalits" lors de la conférence d'examen de Durban et ils prient instamment "tous les gouvernements qui y participent d'accepter que la discrimination de caste figure parmi les sujets de discussion".

Déclaration morale et solidarité

Mais certains militants indiens n'espèrent pas grand chose de la Conférence d'examen de Durban. "Le gouvernement indien a fait en sorte que la discrimination de caste ne soit pas abordée à Genève", a déclaré Vijaykumar Parmar, membre de la Campagne nationale pour les droits fondamentaux des dalits en Inde.

Il a appelé la communauté oecuménique à faire une "déclaration morale" et à aider les Eglises du monde entier à prendre conscience de la discrimination de caste. L'un des participants qui se sont engagés à faire passer le message dans les Eglises, le pasteur Lesley Anderson, président de la Conférence des Eglises des Caraïbes (CCC) a promis d'aborder cette question préoccupante avec son homologue catholique romain dans le cadre de la CCC.

Vijaykumar Parmar, faisant observer que le Guatemala avait soutenu la cause des dalits lors de la Conférence de Durban en 2001, a suggéré que mobiliser l'aide de pays, même petits, pourrait faire avancer la lutte des dalits pour leur libération.

Dans la Déclaration de Bangkok, les participants à la conférence se sont engagés à faire de la libération des dalits un objectif central de la mission. Cette Déclaration appelle les Eglises des pays touchés à être en "pleine solidarité avec les mouvements dalits et de s'exprimer d'une même voix dans leurs efforts en faveur de la libération des dalits."

Selon la Déclaration, on attend des Eglises qu'elles mettent en oeuvre des programmes de sensibilisation, donnent aux dalits les moyens de s'émanciper, qu'elles surveillent les atrocités perpétrées pour des motifs de caste et réagissent lorsqu'elles se produisent, qu'elles encouragent les dalits à exprimer leur culture dans le culte, la liturgie et la théologie, et qu'elles soutiennent les initiatives des femmes dalits.

En outre, ce texte appelle la communauté internationale à faire campagne pour que l'on mette fin à la vidange manuelle des latrines d'ici à la fin de 2010. Ce travail dégradant, imposé aux dalits par le système des castes, implique qu'ils doivent enlever à mains nues les excréments humains des latrines et les transporter dans des corbeilles jusqu'aux décharges.

La déclaration appelle aussi les Eglises des pays moins ou différemment affectés par ce type de discrimination à offrir des ressources destinées au travail de solidarité dans leur propre pays et dans ceux où existe la discrimination de caste et à faciliter des échanges et des visites de découverte réciproques.

Les Eglises de pays moins affectés exerceront des pressions sur leurs gouvernements et demanderont aux sociétés du secteur privé et aux banques qui investissent en Inde de faire en sorte que leurs investissements encouragent des possibilités d'emploi égales pour les dalits.

Observatoire mondial sur la violence à l'égard des dalits

Afin de soutenir une campagne internationale contre la discrimination de caste, la Déclaration de Bangkok appelle les organismes oecuméniques mondiaux à développer leurs activités en cours sur la justice pour les dalits, notamment en instituant un observatoire mondial sur la violence à l'égard des dalits et en en faisant part aux Eglises membres et à d'autres organismes.

La déclaration demande aussi l'établissement d'un groupe de travail chargé du suivi de la conférence de Bangkok. De même, les participants à la conférence de Bangkok se sont engagés à contribuer à porter la solidarité envers les dalits au plan international, et cela dans leurs pays respectifs.

"L'amour de Jésus au coeur, je vais battre le rappel pour la justice et la liberté des dalits, des Africains et des autres peuples opprimés, et notamment du mien, parce que, en tant que chrétiens, nous devons porter les fardeaux les uns des autres avec courage et sans crainte," a déclaré Ashraf Tannous, de l'Eglise évangélique luthérienne de Jordanie et de Terre Sainte.

Déclaration et appel de Bangkok (en anglais, pdf, 76 KB)

Informations supplémentaires sur la conférence de Bangkok

Pour de plus amples informations sur les activités du COE en solidarité avec les dalits

Fédération luthérienne mondiale

Articles sur la conference (en anglais):