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Réunion du Comité Central, août / septembre 2012

Traduction de l’anglais
Service linguistique, COE

1.        La Polynésie française actuelle (Maohi Nui) est devenue protectorat français en 1842 et colonie française en 1880; pourtant, ce n’est qu’en 1946 que le peuple autochtone Maohi a acquis la citoyenneté française. À la fin du xixe siècle, la France avait annexé toutes les îles qui constituent aujourd’hui la Polynésie française. Ces îles étaient gouvernées en vertu d’un décret de 1885.

2.        En 1945, au moment de la création de l’ONU, l’une de ses premières initiatives a été d’entamer un processus de décolonisation en bonne et due forme, et donc de dresser une liste de territoires devant encore être décolonisés. L’article 73 de la Charte des Nations Unies (territoires non autonomes), ainsi que la Résolution 1514 de l’Assemblée générale de l’ONU (sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux) décrit la mission de l’ONU consistant à décoloniser des territoires encore non autonomes. Les colonies françaises de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française figuraient sur la liste des territoires devant être décolonisés. Toutefois, en 1947, la France est parvenue à faire rayer de la liste la Polynésie française, sans consultation préalable du peuple de Maohi Nui.

3.        En 1958, la France a organisé un référendum dans ses colonies du Pacifique, mais l’opposition à la colonisation française a été réprimée. Par la suite, Maohi Nui est donc demeuré colonie française. Des mouvements tendant à obtenir une autonomie locale accrue ont commencé en 1977, et de nouveaux statuts prévoyant la création d’autorités exécutives locales élues en bonne et due forme ont été approuvés à Paris en 1977. En 2003, le statut de la Polynésie française a été modifié, elle est devenue une «collectivité d’outre-mer», puis en 2004, elle a été déclarée «pays d’outre-mer».

4.        Aujourd’hui, la Polynésie française est un territoire français semi-autonome qui a son parlement, son assemblée, son président et son gouvernement exécutif. Néanmoins la France continue à exercer son influence sur les affaires intérieures. Les dirigeants n’ont qu’un pouvoir limité sur de nombreux domaines essentiels, relatifs aux affaires locales et internationales. C’est par exemple la France qui administre la justice et le système de l’instruction publique, la défense, la monnaie, la santé, l’émigration, les droits fonciers, l’environnement et les frontières maritimes internationales, sans le consentement ni la participation du peuple polynésien.

5.        Les dirigeants politiques et ceux des Églises, en Polynésie française, pensent que l’ONU devrait se préoccuper de leur lutte pour la liberté, l’autonomie et le droit à l’autodétermination. En août 2011, l’Assemblée de Polynésie française a voté la réinscription de ce territoire sur la liste de décolonisation des Nations Unies. La France ne reconnaît pas cette résolution qui a pourtant été adoptée par la majorité de l’Assemblée territoriale.

6.        Des efforts efficaces pour défendre la cause d’une réinscription de la Polynésie française sur la liste de l’ONU des territoires à décoloniser sont un premier pas essentiel vers l’autodétermination. Le travail de base devrait être entrepris par l’intermédiaire du Comité des 24 (Comité spécial de l’ONU sur la décolonisation). Pour parvenir à ce but, le soutien de la communauté internationale est essentiel.

7.        En septembre 2011, la Conférence des Églises du Pacifique (CEP) a organisé une consultation avec des acteurs politiques, ecclésiaux et régionaux de la région Pacifique afin de débattre des stratégies de campagne pour la réinscription de la Polynésie française sur la liste de l’ONU des territoires à décoloniser. Les communautés membres du COE situées dans le Pacifique ont demandé le soutien du COE pour leurs initiatives de défense de la cause lors de la visite du secrétaire général du COE dans leur région en septembre 2011.

8.        Lors de son Synode de 2012, le Conseil de l’Église protestante maohi a décidé de faire «appel à la Conférence des Églises du Pacifique et au Conseil œcuménique des Églises, leur demandant de soutenir ses efforts en vue de la réinscription de la Polynésie française (Maohi Nui) sur la liste de l’ONU des pays à décoloniser». Le Synode de l’Église protestante maohi a également déclaré que «le Conseil considère la réinscription de la Polynésie française sur cette liste comme un moyen de protéger le peuple contre les décisions et initiatives de l’État français qui vont à l’encontre de ses intérêts; la réinscription constitue la reconnaissance des droits humains du peuple de Polynésie française; le Conseil réitère que sa foi sauvera le peuple maohi dont la conscience a été manipulée, et que c’est le peuple qui prendra la décision concernant la souveraineté de la nation».

C’est dans ce contexte que le Comité central du Conseil œcuménique des Églises, réuni à Kolympari, Crète (Grèce), du 28 août au 5 septembre 2012:

A.       reconnaît les droits humains universels de toutes et tous, et en particulier le droit à l’autodétermination de toutes les personnes opprimées et colonisées et des populations autochtones dans le monde, conformément à la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones;

B.       appelle la France, les Nations Unies et la communauté internationale à soutenir la réinscription de la Polynésie française sur la liste des Nations Unies des pays à décoloniser, en suivant l’exemple de la Nouvelle-Calédonie;    

C.       encourage les autorités françaises à remplir leurs obligations et à mettre à disposition tous les moyens nécessaires au développement économique, social et culturel du peuple maohi;

D.      prie instamment la France d’indemniser toutes les victimes des essais nucléaires et de la radioactivité;

E.       invite ses Églises membres et les organisations internationales d’inspiration religieuse à défendre la cause de la réinscription de la Polynésie française sur la liste de l’ONU des pays à décoloniser et, finalement, de sa décolonisation complète;

F.       appelle la Commission des Églises pour les affaires internationales à favoriser l’initiative mondiale de défense de la cause de la réinscription de la Polynésie française sur la liste de l’ONU, notamment le travail de base par l’intermédiaire du Comité des 24 de l’ONU;

G.      prie pour le peuple et les Églises de Maohi Nui à l’heure où ils entament leur lutte juste et pacifique pour l’autodétermination.

APPROUVÉ