Par Mark Beach (*)

La Semaine d'action du Conseil oecuménique des Eglises (COE) auprès des Nations Unies a été marquée par des bonnes nouvelles et des mauvaises nouvelles concernant les changements climatiques.

Tout d'abord, les mauvaises:

Un responsable des Nations Unies a déclaré aux quelque 80 participants réunis à la Semaine d'action mondiale organisée annuellement que les réunions sur les changements climatiques qui se tiennent à Copenhague en décembre ne semblent pas s'acheminer vers la signature, par les gouvernements mondiaux, d'un accord contraignant.

Cela signifie que les "bouleversements climatiques" vont continuer comme avant, "à moins que les gouvernements ne trouvent le courage de prendre les choses en main", a déclaré Olav Kjorven, secrétaire général adjoint et directeur du Bureau des politiques de développement du Programme des Nations Unies pour le développement, dans une allocution d'ouverture adressée le lundi 16 novembre au groupe.

La Semaine d'action du COE auprès de l'ONU, qui s'est tenue à New York, Etats-Unis, du 15 au 20 novembre, a rassemblé des militants chrétiens du monde entier afin d'examiner plusieurs sujets, notamment la situation des personnes déplacées par les changements climatiques, les préoccupations des populations autochtones du monde entier et la violence qui perdure en Colombie. Par ailleurs, cette semaine d'action offre généralement l'occasion aux militants d'établir des contacts avec des représentants de diverses missions permanentes auprès de l'ONU présentes dans la ville.

Le groupe se réunit au Church Center for the United Nations, un centre chrétien situé littéralement dans l'ombre de la tour qui abrite le siège de l'ONU et son complexe administratif.

Et les bonnes nouvelles?

Il reste une possibilité que des décisions importantes soient prises à Copenhague et c'est pourquoi l'Eglise doit faire pression pour qu'un accord soit signé.

"Sommes-nous prêts à assumer notre vocation à être une Eglise de contre-culture?", s'est interrogée la pasteure Elenie Poulos dans une prédication d'ouverture dite le dimanche 15 novembre au soir. "Aujourd'hui peut-être plus que jamais, le monde a besoin d'un leadership comme celui que l'Eglise est à même d'offrir."

Elenie Poulos est une pasteure de l'Eglise unifiante d'Australie et elle est membre de la Commission des Eglises pour les affaires internationales du COE.

"C'est le leadership dont le monde a besoin - un leadership de foi et de justice, une preuve vivante qu'un autre monde est possible", a-t-elle déclaré.

Olav Kjorven a fait écho aux propos de la pasteure, affirmant que les groupes religieux du monde entier n'ont pas encore pris conscience du poids qu'ils pourraient avoir pour inciter les gouvernements à s'attaquer immédiatement à la question des changements climatiques et à d'autres préoccupations liées à la justice.

"Il y a un autre élément, beaucoup plus simple", a indiqué Olav Kjorven dans son discours. "Vous avez aussi un énorme poids économique, qui est trop rarement reconnu, même parmi vous."

"Vous atteignez de façon régulière plus de gens que n'importe quelle autre institution dans le monde aujourd'hui", a-t-il ajouté.

Olav Kjorven a mis en avant le fait que les groupes religieux, y compris les Eglises chrétiennes, possèdent environ 8% des terres dans le monde, dont la majeure partie est constituée de forêts. "Sur les marchés financiers, les institutions religieuses sont le troisième plus gros acteur, par le biais des fonds de pension."

Il a expliqué que lorsque les groupes religieux décideront que les activités à haute émission de carbone "sont un péché, pour reprendre vos termes", et qu'ils commenceront à délaisser les modes de vie fortement émetteurs de carbone pour adopter des modes de vie plus sains, "cela enverra des ondes de choc à travers les marchés financiers."

"L'école de théologie de Nike"

Le fait que les groupes religieux - et notamment les Eglises - peuvent avoir une influence énorme sur les changements climatiques et, plus généralement, sur les dirigeants, et qu'ils peuvent défaire les injustices dans le monde, n'a pas été occulté dans l'allocution donnée lundi par Lois M. Dauway, membre du Comité central du COE et secrétaire générale adjointe provisoire du General Board for Global Ministries de l'Eglise méthodiste unie.

Mais Lois Dauway s'est demandé si l'Eglise était à la hauteur de la tâche.

Se disant "irritée" ces derniers temps par les interrogations sur la méthode qui doit suivre l'Eglise pour défaire les injustices dans le monde, elle a expliqué au groupe que l'Eglise doit avoir une approche théologique pour traiter les questions de justice comme celle des changements climatiques.

"Je l'appelle l'école de théologie de Nike", a-t-elle déclaré, faisant référence au célèbre fabricant de matériel sportif.

Empruntant le slogan publicitaire de Nike pour illustrer ce que l'Eglise doit faire, Lois Dauway a déclaré qu'il était temps de passer à l'action: "Just do it!", a-t-elle martelé - faisons-le!

Elle a affirmé au groupe que les Eglises et la communauté oecuménique ont les ressources nécessaires pour défaire les injustices dans le monde, mais, a-t-elle ajouté, "nous n'en avons tout simplement pas la volonté."

Reconnaissant que l'Eglise a accompli de nombreuses choses positives, elle a instamment invité le groupe à en faire davantage. "Si nous, au sein des Eglises, voulons vraiment apporter le changement dans ce monde, nous devons nous rendre compte qu'il faut plus que des résolutions et des sermons éloquents sur la paix et la justice", a-t-elle déclaré.

Il est nécessaire d'écouter celles et ceux qui souffrent et de se joindre à eux, "tantôt en menant, tantôt en étant mené" et en unissant les ressources des Eglises. "Nous pourrions en effet changer radicalement le cours du monde au nom de Jésus", a affirmé Lois Daway. "Le Seigneur sait que nous en avons le pouvoir, alors faisons-le."

"Le temps manque à la planète et à ses habitants et nous ne devons pas nous contenter de résister aux paradigmes dominants", a dit la pasteure Poulos dans son sermon. "Nous devons les transformer. Il nous faut un système économique qui ne soit pas fondé sur la cupidité, le matérialisme, l'individualisme et la peur de la pénurie."

Olav Kjorven a déclaré qu'étant donné l'échec de l'accord de Copenhague, il reste des éléments à récupérer dans les réunions qui se tiennent en décembre, "par exemple le cadre pour un accord futur", si possible pour 2010.

Il a toutefois insisté sur le fait qu'il faut que les groupes religieux interviennent dès maintenant. "Nous avons besoin d'une voix bien plus forte concernant les aspects liés à la justice sociale des changements climatiques", a-t-il indiqué. "Et nous avons besoin de changements sur le long terme."

La Semaine d'action a été organisée sous les auspices du Bureau de liaison du COE auprès des Nations Unies.

(*) Mark Beach est le directeur de la Communication du COE.

Plus d'informations sur la Semaine d'action du COE auprès des Nations Unies (en anglais)

Galerie de photos 

  

Enregistrements audio des allocutions d'Olav Kjorven et de Lois Dauway, ainsi que d'interviews sur les thèmes de la Semaine d'action (en anglais)

Travail du COE sur les changements climatiques

Les opinions exprimées dans les reportages publiés par le COE ne reflètent pas nécessairement la politique du COE. Ce texte peut être reproduit gratuitement, en indiquant le nom de l'auteur.