"La migration est une réalité de la vie. Il s'agit autant d'un instinct de survie que d'une conséquence inévitable de la mondialisation. Nous ne pouvons ni l'ignorer, ni l'empêcher", ont déclaré les participants à une réunion publique d'information-débat sur la migration organisée les 15 et 16 avril à Beyrouth, Liban, sur le thème "Migration et paysage ecclésial en mutation". "Les migrants ne sont pas des marchandises, des étrangers en situation d'illégalité ou simplement des victimes, ce sont des êtres humains."

Partout dans le monde, des gens quittent leur pays en quête de sécurité, de liberté ou d'une vie meilleure. Ces flux migratoires sont un défi pour les Eglises car les migrants apportent leurs propres traditions et valeurs dans les paroisses locales, ou créent leurs propres communautés religieuses. En même temps, les Eglises ont le devoir de s'acquitter de leur mandat d'agir et de prendre position en faveur des faibles dans les situations où les migrants et les réfugiés sont victimes de l'injustice. Ces phénomènes mondiaux et la manière dont ils se manifestent au Moyen-Orient ont été au coeur de la réunion publique.

"Pour les chrétiens, accueillir l'étranger n'est ni facultatif, ni conditionnel", a affirmé le secrétaire général du Conseil oecuménique des Eglises (COE), le pasteur Samuel Kobia, dans son allocution aux participants le mardi. A une époque "où la migration prend des formes nouvelles", a-t-il ajouté, l'Eglise devrait élargir son hospitalité en se faisant "l'avocat et le défenseur du droit des personnes à circuler librement dans leur pays, à quitter leur foyer et à vivre ailleurs, en quête du droit qui leur est donné par Dieu de vivre dans la dignité."

Rappelant à son auditoire le cas des 54 migrants birmans morts asphyxiés quelques jours plus tôt dans le camion qui devait les faire passer en Thaïlande, le secrétaire général de la Conférence chrétienne d'Asie Prawate Kid-arn a appelé à une approche positive des migrants. "La migration est une expression courageuse de la volonté d'un individu de surmonter l'adversité et de vivre une vie meilleure." Pour Prawate Kid-arn, "le moyen le plus efficace de prévenir le trafic est de fournir des voies légales en pratiquant une politique de la migration et de l'emploi correspondant aux normes nationales."

Cette évaluation a été soutenue par Doris Peschke, secrétaire générale de la Commission des Eglises auprès des migrants en Europe, qui a qualifié la politique de migration et d'asile de l'Union européenne de "contradictoire et ambiguë". Doris Peschke a cité l'exemple positif de la migration au sein de l'UE, qui est abordée "non par des lois sur les étrangers mais par des programmes d'aide sociale et d'intégration", en ajoutant que "c'est cette approche qu'il faut adopter aussi à l'égard des ressortissants de pays tiers."

Migration au Liban

Le Liban et le Moyen-Orient en général sont à la fois lieux d'origine et de destination de travailleurs migrants et de réfugiés. Les représentants de la société civile locale ont fourni une contribution importante à la réunion et, lors de la réception d'ouverture, les dirigeants des six communautés musulmanes et chrétiennes les plus nombreuses du pays ont présenté le Liban comme un modèle de société religieusement pluraliste et se sont engagés à s'attaquer ensemble au problème de la migration.

"L'émigration chrétienne doit être stoppée. Chrétiens, vous devez revenir!", a déclaré le professeur Ibrahim Shamseddine lors d'une discussion consacrée aux effets exercés sur la migration par le processus de paix au Moyen-Orient - ou par l'absence de processus de paix. "Je prends cette position non pas parce que je suis un modéré, mais parce que je suis un fondamentaliste, car je soutiens les fondements non violents de l'islam."

Des étudiants chrétiens libanais ont parlé avec éloquence de leur attachement à leur pays dans un contexte où tous les universitaires sont confrontés à la question: "Pourquoi est-ce que je reste ici?" La société libanaise est, plutôt qu'un creuset, un plat de taboulé dont les diverses composantes créent un mélange succulent", a affirmé Nayiri Kalaydijan, étudiante à l'université Haigazian.

Le thème de l'immigration au Liban, et en particulier de la migration des employé(e)s domestiques, a suscité la controverse. Alors qu'une personne de Sri Lanka mettait en question le traitement des travailleurs asiatiques par les autorités d'immigration, un fonctionnaire a affirmé que l'autorité d'immigration libanaise est la première de la région à avoir déclaré illégal l'usage de la violence à l'égard des étrangers détenus.

Présentant les résultats de ses recherches sur les employé(e)s domestiques au Liban, le professeur Ray Jureidini, directeur du Programme d'études sur la migration forcée et les réfugiés à l'Université américaine du Caire, a admis que des progrès notables avaient été accomplis dans le traitement des migrants, et souligné l'influence positive exercée par l'organisation catholique Caritas dans les centres de détention.

Les sujets abordés dans le cadre de la réunion publique seront repris lors de la session, les 17 et 18 avril, du Réseau oecuménique mondial sur la migration (GEM), qui réunit des organisations oecuméniques régionales, des Eglises et des agences chrétiennes travaillant sur ce thème dans le monde.

Tant la réunion publique que la session du GEM sont organisées conjointement par le COE et le Conseil des Eglises du Moyen-Orient (CEMO), et accueillies par le Catholicossat arménien de Cilicie à Beyrouth, Liban.

Texte complet (en anglais) de la déclaration de la réunion publique sur le thème "The Changing Ecclesial Context: Impact of Migration on Living Together"(Le contexte ecclésial en mutation: les effets de la migration sur la vie communautaire)

Informations complémentaires sur le Réseau oecuménique mondial sur la migration

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