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Mantle made for the inaugural service of the NCCA in 1994. Photo: NCCA

En 2018, nous célébrons le 70 anniversaire du Conseil œcuménique des Églises. Dans lobjectif doffrir un témoignage vivant de la fraternité œcuménique et de notre cheminement commun, les Églises membres ont partagé des récits de personnes, d’événements, de réalisations et même d’échecs qui enrichissent notre quête collective de lunité des chrétiens.

Ce récit a été rédigé par Ray Williamson Oam, cofondateur du Centre d’études œcuméniques d’Australie

Les idées ou les opinions exprimées dans cet article sont celles de leur auteure et ne reflètent pas nécessairement les politiques du Conseil œcuménique des Églises.

L’initiative œcuménique la plus importante jamais prise en Australie, après la formation du Conseil national des Églises d’Australie (NCCA) en 1994, fut la signature du document d’alliance nationale en 2004.

Par sa formation, le NCCA a remplacé le précédent organisme œcuménique national, le Conseil des Églises d’Australie, avec une première adhésion de l’Église catholique romaine et l’ouverture du dialogue avec l’Église luthérienne d’Australie en préparation d’une future adhésion (effective en 1998).

En cette époque de renouveau œcuménique, la nouvelle Commission Foi et unité du NCCA a naturellement pris pleinement acte de la dernière déclaration internationale sur l’unité – la Déclaration de Canberra – et de son incidence sur la vie des Églises d’Australie: comment les Églises peuvent-elles se remettre en question et obtenir de l’aide dans l’approfondissement de l’engagement pris les unes envers les autres lors de la création du NCCA?

Koinonia et une alliance locale

La commission a également pu compter sur les connaissances et l’expérience des partenariats œcuméniques locaux d’Angleterre et leurs alliances fondatrices, pour ensuite élaborer une proposition destinée aux Églises en vue de former une alliance nationale en Australie. L’objectif était double. D’une part, une telle alliance sous-tendrait un engagement continu des Églises à l’échelle nationale à progresser vers une expression d’unité plus visible et à avancer vers une expérience de communion (koinonia) plus profonde. D’autre part, elle prendrait une forme de «permission», un modèle destiné aux Églises locales les invitant à conclure des alliances entre elles, puisque la nature même de l’accord ouvre de nouvelles perspectives à toute Église concluant une alliance à l’échelle nationale, propose des orientations et encourage leurs congrégations à faire alliance à l’échelle locale.

Questions de réflexion

Il a été admis que la conclusion d’une alliance nationale prendrait du temps et que la Commission devrait obtenir l’accord des Églises avant de poursuivre. Par conséquent, la Commission en a notifié le forum national du NCCA de 1996 et a demandé l’autorisation de poser des questions aux Églises membres afin de stimuler leur réflexion et obtenir des réponses pour définir la base sur laquelle des propositions spécifiques d’alliance seront formulées.

Les questions furent les suivantes:

  • À la lumière de la Déclaration de Canberra, quels ont été les accomplissements observés depuis l’Assemblée du Conseil œcuménique des Églises (COE) de 1991?
  • Quelles mesures spécifiques seront prises par votre Église au cours des cinq prochaines années en faveur d’une unité plus visible?
  • Quelles mesures spécifiques votre Église prévoit-elle pour progresser vers l’atteinte de cet objectif au cours de la prochaine période de trois ans?
  • Quelles mesures spécifiques encouragerez-vous les autres Églises à prendre pour progresser vers l’atteinte de cet objectif?

La communication qui s’ensuivit, destinée aux Églises, visait à garantir que ces sujets soient débattus au plus haut niveau au sein de chaque Église et à identifier des idées et des conseils «des plus concrets et pratiques aux plus créatifs et inventifs».

Multidimensionnelle

Les réponses des Églises n’ont pas été nombreuses, mais elles furent décisives, intéressantes, et leur contenu parfois surprenant. Ces réponses, associées à un autre document intitulé «Être une Église dans le Queensland rural», furent employées par la Commission pour modeler l’alliance nationale. Il ressortait clairement de ces sources, et de la connaissance des diverses alliances locales anglaises, qu’une alliance des Églises d’Australie devait être multidimensionnelle. Une telle alliance se devait de faire preuve de flexibilité et de réalisme quant aux différentes possibilités offertes par les relations en vigueur entre les Églises, permettant alors aux Églises de faire alliance dans le respect de ces dimensions auxquelles elles pouvaient alors consentir – tout en ouvrant les Églises à ce qui «serait possible si elles parviennent aux limites de ce qui est admis».

Consultations approfondies

La proposition d’une telle alliance fut dès lors présentée au forum national de 1998, en reconnaissant que le processus sera «exigeant et demandera de faire preuve de diligence et de sensibilité», tout en «valant les efforts déployés du fait du fort potentiel de renouveau œcuménique». Il a été consenti, à l’issue du forum, de procéder aux consultations avec les Églises et d’encourager les Églises membres à ouvrir le dialogue dans le respect de leurs contraintes et disciplines mutuelles, en vue d’élaborer, à partir de l’alliance proposée, un document final qui sera approuvé lors du prochain forum national, trois ans plus tard.

Du fait des possibilités nombreuses et variées de coopération et d’engagement entre les Églises, il leur a été demandé de discuter entre elles sur une base individuelle au cours des mois qui suivirent. Afin de faciliter le déroulement de tels échanges, il a été suggéré que le thème soit immédiatement ajouté à l’ordre du jour des dialogues bilatéraux nationaux. Aussi la période d’intervention a-t-elle été marquée par des consultations approfondies visant à donner toutes les occasions possibles aux Églises de s’engager dans la préparation de l’alliance. En 2001, la Commission proposa alors un nouveau document intitulé «En préparation de l’alliance» pour faciliter davantage le dialogue entre les Églises.

Par ailleurs, afin de soutenir le processus d’une nouvelle manière, la Commission a réalisé la vidéo «Portraits d’unité», relatant l’histoire d’alliances locales existantes et d’autres exemples de coopération en Australie. Cette ressource visait à sensibiliser à la conclusion d’alliances locales et à stimuler l’imagination des Églises à l’échelle nationale et locale alors qu’elles répondaient à l’invitation d’étudier les différentes options de nouvelle alliance multidimensionnelle.

Par conséquent, à l’approche du forum de 2001, l’approbation du document d’alliance nationale était attendue avec impatience. Ce document était perçu comme un signe d’espérance, doté d’un fort potentiel et ouvrant la voie à de nouvelles perspectives d’évolutions œcuméniques.

Des défis, des débats et un tournant décisif

Or, il n’en a pas été ainsi. De nombreux délégués des Églises n’avaient pas pris connaissance du document au préalable. Ils n’étaient pas prêts à accepter le type d’engagement que représentait l’alliance –  en effet, il s’est avéré que plusieurs Églises membres n’avaient pas entrepris la démarche de comprendre toutes les implications de la signature de l’alliance. L’expérience a révélé la frustration qui peut facilement émerger d’un Conseil des Églises au sujet de la communication avec les Églises membres. Il est difficile d’imaginer comment le processus de consultation aurait pu être davantage approfondi. Pourtant, à un moment charnière, de nombreux représentants des Églises au forum national du NCCA n’en avaient pas pris connaissance.

Bien qu’à bien des égards au cours du forum national, la conclusion d’une alliance semblait vouée à l’échec, le résultat n’en fut pas moins positif. Il a marqué un tournant décisif pour les responsables d’Églises qui se sont engagés plus activement dans le processus; le forum a abouti à l’adoption de la «Déclaration d’intention» –  soit la première partie du document d’alliance –  après un débat abondant et approfondi, alors que le reste du document a fait l’objet de discussions prolongées, utiles et complexes qui ont débouché sur des amendements détaillés; et les Églises ont pris de nouveaux et formidables engagements.

Niveaux d’engagement

Le document en l’état se déclinait en trois parties: la déclaration d’intention, cinq dimensions d’engagement, et une promesse d’identifier des expressions d’unité plus visibles.

La principale section du document prévoyait la possibilité pour les Églises d’appliquer ensemble l’un ou plusieurs des cinq niveaux d’engagement:

  1. Prier ensemble et les unes pour les autres et étudier ensemble les questions de foi;
  2. Partager des ressources physiques et ne pas entreprendre d’initiative sans en avoir préalablement discuté avec les autres;
  3. Aborder les questions et stratégies de mission les unes avec les autres et répondre ensemble aux besoins de la communauté locale;
  4. [a] Reconnaître le sacrement du baptême administré par chacune des Églises et acter cette reconnaissance par l’utilisation d’un certificat de baptême commun, et [b] inviter et accueillir les membres d’autres Églises à l’eucharistie en fonction du besoin pastoral;
  5. Continuer à œuvrer pour atteindre l’objectif de partage d’un ministère ordonné mutuellement reconnu.

De retour aux Églises

Par la suite, le document d’alliance révisé fut transféré aux Églises membres en leur demandant de porter une attention particulière aux sections du document où le nom des Églises respectives était susceptible de figurer.

À la réception des réponses qui se succédèrent, il fut remarqué qu’elles ne furent pas toutes franches. Certaines demandaient une reprise des négociations, jusqu’à la veille du forum national de 2004. D’autres demandaient l’ajout d’une note de bas de page à la section qui posait certaines difficultés aux Églises en question. Pour une autre Église, l’idée même d’alliance posait problème, ce qui fut résolu par la prise de conscience que pendant un certain temps le document n’était pas intitulé «Alliance», mais «La formation d’une alliance par les Églises d’Australie» dans le but de souligner la nature évolutive du processus et d’éviter toute impression qu’il s’agissait d’un accord ferme.

Célébration

C’est ainsi qu’au rassemblement du NCCA en 2004, l’adoption du document d’alliance ne fut qu’une formalité. Les responsables de chaque délégation des Églises membres (au nombre de quinze à l’époque) ont signé cette déclaration finale du document:

«Au nom de nos Églises, nous confirmons notre engagement à ce processus d’alliance. À cette étape de notre cheminement vers une unité visible, nous confirmons les parties du document faisant mention du nom de notre Église, en signe de ce que nous pouvons faire en alliance ensemble. »

Une célébration liturgique était la seule réponse possible et elle eut lieu quelques heures plus tard. Ce fut la célébration d’un moment capital dans l’histoire de l’œcuménisme en Australie! Ce fut également une manière appropriée de célébrer le dixième anniversaire de la formation du NCCA.

Ce fut un moment d’exaltation. Ce fut également le moment de faire preuve de réalisme. Certains aspects du document d’alliance ne reflétaient rien de plus que des initiatives existantes. Ainsi, la reconnaissance mutuelle du baptême ne constituait pas en soi une nouvelle initiative; elle trouve son origine près de vingt ans plus tôt, lorsque quatre, puis six Églises s’y sont engagées.

Il n’en demeure pas moins que d’autres aspects constituaient d’importantes avancées. À nouveau, en reprenant l’exemple de la reconnaissance mutuelle du baptême, un plus grand nombre d’Églises, notamment l’Église apostolique arménienne, la Fédération des congrégations et deux autres Églises orthodoxes byzantines ont adhéré à l’accord. Par ailleurs, l’Église presbytérienne, bien qu’elle ne soit pas membre du NCCA et ne soit donc pas signataire de ce document, par ailleurs membre des six Églises en 1988, a accepté de participer à cette reconnaissance mutuelle du baptême. C’est ainsi que les six Églises des années 1980 devinrent dix.

Un signe d’espérance

Ce fut également un moment de satisfaction puisqu’il prenait acte du sérieux avec lequel les Églises vivaient leur adhésion au NCCA et acceptaient les défis à relever pour de plus amples expressions de leur unité en Christ. Ce fut également le signe que le NCCA respectait son mandat: la mesure de l’œuvre de tout Conseil des Églises réside dans ce qu’il permet d’accomplir entre les Églises pour renforcer leurs liens en vue d’exprimer leur unité avec plus de visibilité.

Par ailleurs, il apparaît que ce document australien a obtenu l’approbation de l’Église toute entière: par exemple, lors de sa visite à Sydney pour la Journée mondiale de la jeunesse en 2008, le pape Benoît XVI en a eu connaissance et l’a publiquement salué; les Conseils œcuméniques d’Écosse et des États-Unis ont cherché à obtenir des informations à son sujet; et le COE l’a également reconnu.

Plus important encore, le formidable potentiel de ce document d’alliance réside dans la permission inhérente donnée aux communautés religieuses locales à travers le pays de conclure leur propre alliance entre elles. Pour ces diverses raisons, le document «La formation d’une alliance par les Églises d’Australie» demeure un signe d’espérance à bien des égards!

Réception

À la suite du forum, la question clé relative à ce document concernait sa «réception». Comment et dans quelle mesure était-il «reçu» par les Églises? Comment et dans quelle mesure affectait-il la vie des Églises membres à tous les niveaux? Il a été estimé que la Commission Foi et unité devait assumer la responsabilité de faire progresser et encourager les Églises dans ce processus de réception.

À cette fin, par l’entremise de la direction du NCCA, la Commission a communiqué plusieurs questions aux Églises:

  • Quelles mesures ont été prises par les Églises membres pour garantir que le document d’alliance soit connu, adopté et appliqué à tous les niveaux?
  • Quels objectifs ont été fixés par votre Église pour mettre en œuvre les dimensions approuvées du document?
  • Comment les relations entre votre Église et d’autres Églises ont-elles été renforcées depuis juillet 2004?
  • Comment les Églises membres, réunies au sein du NCCA, peuvent-elles être responsables les unes envers les autres de la mise en œuvre du document d’alliance?

Document vivant

Nombreux étaient ceux qui étaient déterminés à éviter que ce document ne prenne la poussière dans la bibliothèque du secrétaire général, et qu’il demeure une entité vivante.

Une telle détermination était palpable au sein de la Commission Foi et unité. Elle a fait preuve de diligence en rappelant aux Églises les enjeux de l’engagement pris. Elle a présenté la direction du NCCA et a proposé des sessions dédiées à l’alliance et aux processus de «réception» lors du forum national de 2007 et de 2010.

Ces occasions ont été proposées aux représentants des Églises afin de leur permettre d’échanger entre eux sur la manière dont la signature du document a fait une différence et de s’encourager mutuellement en partageant les manières dont les Églises ont répondu à cette invitation d’alliance à une échelle plus locale.

Une autre preuve du caractère vivant de ce document est sa croissance. Depuis 2004, les quatre Églises nouvellement membres du NCCA sont également devenues des Églises «d’alliance», en s’engageant par la signature du document.

Comment faut-il comprendre «La formation d’une alliance par les Églises d’Australie»? Ce document est fort éloigné d’un accord jetant les bases d’une fusion de deux ou plusieurs Églises ou d’un accord issu de la résolution de différends théologiques complexes. Au contraire, il s’agit d’un instrument grâce auquel les Églises peuvent redéfinir leurs relations par une action mutuelle décisive, menant à une participation renforcée à la vie ecclésiale des unes et des autres.

Le document permet aux Églises de veiller attentivement sur leurs liens et continue à leur offrir la possibilité d’agir mutuellement pour progresser sur le chemin de l’œcuménisme.

Prière

Dieu éternel et d’Amour,

tu nous appelles à l’alliance,

à des relations fiables et durables,

en toi et entre nous:

par ta grâce, que nous demeurions

constants dans notre engagement au Christ,

audacieux dans notre quête pour l’unité des uns et des autres, et

authentiques dans notre témoignage de la bonne nouvelle de ton amour.

Au nom du Christ, prions.

Amen.

 

Plus dinformations concernant le 70e anniversaire du COE: www.oikoumene.org/fr/wcc70

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